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Faire une grande traversée

Faire une grande traversée

Partir courir sur deux jours : entre week-end choc et petite aventure

Partir pour une grande traversée en autonomie, c’est bien plus qu’un entraînement pour préparer de longues distances. C’est plonger dans l’essence même de la course à pied : avancer simplement, un pas après l’autre en toute humilité, loin du tumulte et des speakers des courses, avec pour seule richesse le paysage et la fatigue partagée avec des amis ou assumée en solitaire.

C’est une aventure qui marque, parce qu’elle nous ramène à la fois à nous-mêmes et à ce lien unique que l’on tisse avec la montagne, les sentiers et ceux qui nous accompagnent.


Pourquoi se lancer ?

Partir courir sur deux jours, c’est réaliser un week-end choc mais surtout vivre une expérience qui permet de goûter à la fatigue d’un ultra et de renforcer sa confiance en soi.

C’est aussi le plaisir de parcourir une grande distance à la seule force de ses jambes. Pour se dire que c’est possible, et finalement pas si difficile. C’est aussi retrouver les sensations de son corps et renouer avec quelque chose de primaire : se déplacer, manger, boire, dormir.

L’organisation en amont : la clé de la réussite

Avant de partir, il faut garder à l’esprit que ce genre d’expérience est physiquement et mentalement plus difficile qu’une course de distance équivalente.

Pas de concurrents pour vous pousser à avancer un peu plus vite et oublier les douleurs. Pas de supporters dans les villages pour transmettre leur énergie. Pas d’organisation pour poser un balisage, vérifier que les chemins sont praticables, fournir des ravitaillements, prévoir des navettes ou une assistance médicale.

Il faut donc tout anticiper. Personnellement, je prévois toujours que mon tracé puisse faire 10 % de plus que la distance annoncée. Cela m’évite de me mettre dans de mauvaises dispositions mentales si un chemin est fermé et qu’il faut faire un détour.

Rappelez-vous que vous êtes sans filet de sécurité. Si vous n’êtes pas totalement confiants, prévoyez un passage dans une grande ville à mi-parcours le second jour, pour avoir une option de rapatriement. Inutile de transformer l’aventure en calvaire : elle doit rester un plaisir.


Comment tracer un itinéraire intelligent ?

Visez un départ, une nuit et une arrivée dans des grandes villes ou des bourgs bien desservis par le train. Vous y trouverez hôtels, restaurants et épiceries, ceci pour la nuit, le repas du soir et le ravitaillement du lendemain. Cela facilite la logistique, permet de voyager léger et offre la possibilité d’adapter le parcours si besoin.

Voyager léger : que mettre dans son sac ?

Le but est d’avancer avec le strict nécessaire et de profiter des ressources trouvées en chemin. Sans assistance, le sac se remplit vite (couverture de survie, veste, change, nourriture, eau, chargeur de téléphone, lampe frontale…).

Quelques astuces :

  • S’arrêter dans les boulangeries croisées sur la route.
  • Cueillir des fruits en saison (en hauteur pour les baies, afin d’éviter toute contamination par l’urine d’animaux sauvages).
  • Utiliser la tenue du lendemain comme change minimal pour le soir. Compactez-la dans du film alimentaire : cela la garde au sec, évite le ballotement et permet de ranger la tenue sale au retour.

Vivre l’expérience

Le premier jour, on part frais, l’envie est là. Les kilomètres s’enchaînent facilement car on garde en tête l’immensité du voyage et on reste sur la réserve. Mais rapidement, une course contre le temps s’installe : il faut avancer à un rythme tenable sur deux jours, sans perdre trop de temps.

Sans dossard ni chrono, les pauses s’allongent facilement. En une journée, on peut vite laisser filer quelques heures. Or, ces heures passées dehors fatiguent plus qu’un vrai repos le soir. La clé est simple : il ne s’agit pas d’aller vite, mais d’avancer tout le temps.

  • Mangez en marchant plutôt que de vous arrêter pour un vrai repas. Testez vos sandwichs en amont : dans mon cas, je trouve que le pain blanc est plus agréable que le pain de mie. Il se compacte moins à la mastication et permet de respirer plus facilement en continuant de marcher.
  • Profitez des pauses pipi ou lacets de vos compagnons pour marcher. Ils vous rattraperont en trottinant. Et quand se sera votre tour il feront de même.
  • Évitez de vous attarder aux ravitaillements : chaque arrêt est du temps perdu que vous risquez de vouloir compenser en forçant l’allure. Apprenez à récupérer des affaires dans la poche arrière de votre sac tout en marchant.

Tout ce temps gagné permet de récupérer réellement le soir.

Et le lendemain… c’est une autre histoire. Au réveil, les jambes sont lourdes, le corps proteste. Mais c’est là que commence le vrai apprentissage : courir sur la fatigue, accepter un rythme plus lent, et se rendre compte que oui, c’est possible.


Comment gérer l’eau ?

Si vous traversez des villages, vous trouverez souvent des robinets dans les cimetières. Mais en hiver ou dans des zones reculées, une gourde filtrante est indispensable. Elle permet de remplir vos flasques dans les rivières, fontaines ou points d’eau incertains, en toute sécurité.

⚠️ Attention : testez-la avant de partir. Ces gourdes se bouchent facilement si elles sont stockées longtemps. Pour ma part, je la conserve remplie d’eau salée entre deux utilisations, afin d’éviter la moisissure.

Astuce : pour gagner du temps, chaque coureur devrait avoir sa propre gourde filtrante, car la filtration peut être un peu longue.

En conclusion

Une longue sortie sur deux jours consécutifs n’est pas qu’une séance d’entraînement : c’est une parenthèse, une aventure. En planifiant bien son itinéraire et en restant léger, on découvre qu’il est possible de parcourir de grandes distances avec très peu.

Ce que ça apporte au coureur

  • Mental : repartir le deuxième jour forge une confiance précieuse. C’est elle qui servira dans les ultras quand le doute s’installe.
  • Expérience : on apprend à gérer son effort, son matériel, son hydratation et sa nutrition comme en course. On découvre aussi qu’être efficace aux ravitaillements fait gagner énormément de temps et que le sandwich est un excellent ravitaillement sur les courses de longue durée.
  • Humain : c’est un retour à l’essentiel. On réalise qu’on n’a pas besoin de grand-chose pour vivre. Et si l’aventure est partagée, elle permet d’être en sécurité en cas de pépin et de tisser des liens d’amitié forts.

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